Les systèmes de récompenses : utiles ou futiles?
- Par
- Élisabeth Boily, orthopédagogue
Friandises, retenues, privilèges et avertissements figurent parmi les nombreux incitatifs utilisés par les parents et les professeurs pour motiver les enfants. Que dit la recherche à propos de leur efficacité?
Les effets des récompenses et des punitions sur la motivation scolaire
Les parents et les enseignants sont nombreux à utiliser des systèmes de récompenses et de punitions pour motiver les enfants. Est-ce que ces systèmes motivent réellement les élèves? Tentons de répondre à cette épineuse question.
La motivation intrinsèque et la motivation extrinsèque
Avant d’aller plus loin, il est nécessaire de faire la distinction entre deux catégories de motivations. D’abord, la motivation se définit comme étant l’ensemble des forces internes et externes qui poussent l’élève à produire un comportement (Guay, Grenier et Poitras, 2006). Les forces internes peuvent être le plaisir ou l’importance qu’on accorde à l’activité. Les forces externes réfèrent aux récompenses et aux punitions.
Un enfant qui est motivé par des forces internes a une motivation intrinsèque. Il s’engage dans son travail de façon volontaire, par intérêt ou par plaisir, ou encore parce qu’il anticipe son utilité. L’enfant qui est motivé de manière intrinsèque aime apprendre de nouvelles choses et développer ses compétences. Sa récompense réside dans l’accomplissement de l’activité elle-même.
À l’opposé, un enfant peut être motivé par des forces externes et donc avoir une motivation extrinsèque. Dans ce cas, l’enfant n’effectue pas l’activité pour le plaisir, mais pour obtenir quelque chose d’agréable (récompense) ou pour éviter quelque chose de déplaisant (punition).
On peut donc voir que des forces externes, comme les récompenses et les punitions, peuvent être utilisées pour motiver les enfants. Est-ce que ces techniques sont efficaces?
Pas nécessaires pour les enfants motivés
Darveau et Viau (1997) expliquent que, pour des enfants déjà motivés, les récompenses et les punitions ne sont pas nécessaires et peuvent même nuire, dans certains cas. Elles ont un effet positif uniquement à court terme et nuisent à la longue à la motivation. Voici quelques effets négatifs que ces systèmes peuvent engendrer, selon ces auteurs :
- Les récompenses et les punitions peuvent amener certains enfants à travailler non plus pour apprendre ou pour le plaisir, mais plutôt pour obtenir une récompense ou pour éviter une punition;
- Les récompenses et les punitions créent parfois un trop grand désir de réussir, ce qui peut augmenter le niveau de stress des enfants;
- Ces systèmes ne tiennent pas toujours compte des efforts et des progrès réalisés par les enfants;
- Les règles qui régissent ces systèmes peuvent prêter à des interprétations différentes de la part des enfants et des adultes et ainsi mener à des déceptions;
- Les systèmes de récompenses peuvent contribuer à détourner l’attention de certains élèves en les amenant à prendre le moins de risques possible, de peur de ne pas avoir la note maximale et de ne pas obtenir la récompense;
- Ces systèmes peuvent envoyer des messages contradictoires aux enfants :
- Un parent pourrait donner comme récompense un congé de devoirs à son enfant, ce qui renforcerait l’idée que les devoirs sont des tâches désagréables;
- Un parent pourrait ajouter une tâche scolaire comme punition à son enfant (par exemple, copier des phrases), et ce dernier pourrait faire l’association que l’activité d’apprentissage est une punition, donc une tâche désagréable.
Les meilleures récompenses : l’encouragement et les rétroactions
En bref, les élèves qui possèdent déjà une motivation intrinsèque n’ont pas besoin d’un système de récompenses et de punitions pour être encouragés dans leurs apprentissages. Darveau et Viau (1997) rappellent que le fait de féliciter ces enfants verbalement suffirait à les encourager. D’ailleurs, des études ont révélé que les commentaires et les encouragements qui informent l’élève sur la qualité de ses apprentissages demeurent ceux qui favorisent le plus la motivation intrinsèque de l’élève (Viau, 2009).
De plus, pour maintenir la motivation de façon durable, des recherches auraient démontré que le plaisir serait un atout puissant pour que l’enfant ait envie d’apprendre (Duclos, 2010).
Utiles pour les enfants démotivés
Pour un enfant démotivé, l’encouragement verbal ne se révèlera peut-être pas suffisant. Dans le cas où l’enfant ne s’engage pas et ne persévère pas dans ses travaux, l’utilisation de récompenses et de punitions peut s’avérer utile et efficace. Le cas échéant, ce système de récompenses et de punitions doit amener l’enfant à développer un sentiment de réussite et de contrôle sur ses apprentissages. Lorsque la motivation revient, on peut retirer progressivement les punitions et les récompenses
Exemples de récompenses : laisser son enfant choisir une activité qu’il pourra réaliser avec ses parents (jeu de société, bricolage, expérience, jeu à l’extérieur, etc.), sortie à la crémerie, achat d’une bande dessinée
À retenir
- La motivation intrinsèque découle de l’intérêt ou du plaisir de l’élève, alors que la motivation extrinsèque provient d’une récompense ou d’une punition.
- Pour les enfants ayant déjà une motivation intrinsèque, les récompenses et punitions ne sont pas utiles et risquent plutôt de nuire à sa motivation.
- Les encouragements et les rétroactions suffisent à encourager l’enfant motivé.
- Les récompenses s’avèrent utiles pour les enfants démotivés.
Références
- DARVEAU, P., et R. Viau (1997). La motivation des enfants : Le rôle des parents, Saint-Laurent, Éditions du renouveau pédagogique inc., p.97.
- DUCLOS, G. (2010). La motivation à l’école, un passeport pour l’avenir, Montréal, Éditions du CHU Sainte-Justine.
- GUAY, F., V. Grenier, et S. Poitras (2006). Interventions favorisant la motivation des élèves du primaire et du secondaire.
- VIAU, R. (2009). La motivation à apprendre en milieu scolaire, Saint-Laurent, Éditions du renouveau pédagogique inc.
— Dernière mise à jour: 22 décembre 2017